À quoi attribue-t-on aujourd’hui le « French paradox » ?
L’observation selon laquelle les Français avaient une faible mortalité cardiovasculaire malgré une alimentation riche en graisses saturées, décrite en 1980, a abouti au concept de « French paradox ». En se basant sur une étude populationnelle suggérant que la consommation modérée de vin rouge était associée à une moindre mortalité CV, cette exception française a été hâtivement attribuée à l’effet bénéfique du vin rouge – pour le plus grand bonheur de l’industrie viticole.
Ce concept est aujourd’hui réinterprété à la lumière des recherches scientifiques récentes.
D’une part, il est désormais clairement établi que le mode de vie et les habitudes alimentaires globales jouent un rôle déterminant dans la réduction du risque et de la mortalité cardiovasculaires, avec en première ligne l’alimentation méditerranéenne, reconnue pour ses effets bénéfiques.
D’autre part, l’étude MONICA, menée sous l’égide de l’OMS, a fait prendre conscience de l’existence d’un gradient nord-sud de la prévalence des maladies ischémiques du cœur (des villes comme Lille, Strasbourg et Toulouse ont des taux très différents), remettant en question la validité d’un concept global tel que le French paradox. Enfin, les statistiques de décès par maladies cardiovasculaires
étaient sous-déclarées en France à l’époque des études fondatrices du « French paradox », et le fameux paradoxe ne survit pas au réexamen minutieux des chiffres.
En ce qui concerne l’effet de la consommation modérée de vin rouge, plusieurs études observationnelles ont mis en évidence une « relation en J » entre la quantité d’alcool consommée et la mortalité toutes causes confondues (supposant l’effet protecteur d’une faible consommation), et des études prospectives ont décrit un risque moindre d’AVC et d’infarctus du myocarde chez les consommateurs d’un à deux verres par jour, par rapport aux abstinents.
Néanmoins, les analyses issues de l’épidémiologie génétique font disparaître les bénéfices apparents d’une consommation modérée d’alcool, ne montrant aucun effet protecteur sur les risques d’AVC ou de cardiopathie ischémique, et très peu d’effet sur le risque d’infarctus du myocarde.
 
D’après :
Schlienger JL. Que reste-t-il du paradoxe français ? L’histoire d’une double méprise.  Med Mal Metab 2025;19(2):192-7.
Hill C. Effets de l’alcool sur la santé : le vrai du faux !  Rev Prat (en ligne) 26 avril 2024.

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